Les femmes et le travail
Vie privée - vie professionnelle
En octobre 1995, le Climaf (Comité de Liaison de la Franc-Maçonnerie Féminine) se réunissait en Colloque, avec pour thème :
‘’Le Travail des Femmes’’.
Ce sujet est donc récurrent et brûlant d’actualité. Dans quelle mesure, les choses ont-elles changé aujourd’hui ?
Dans le texte de 1995, qui introduisait cette journée, force est de constater que seules la révolte et la lutte ont permis aux femmes d’améliorer leur condition : droit de vote et d’éligibilité, droit de travailler, d’être indépendantes financièrement etc…
Cette féminisation de l’emploi n’implique malheureusement pas la qualité des conditions de travail, ni la protection des femmes. Il semble que là encore, un long chemin soit à parcourir. La difficulté pour elles de pénétrer dans le bastion sacro-saint des emplois dits réservés aux hommes est encore chose difficile. En 1995, un rapport de l’OIT (Organisation Internationale du Travail), démontre qu’aucun pays ne traite les femmes à l’égal des hommes.
Mais pourquoi tous ces obstacles, cette réticence masculine ?
De tous temps, au travers des époques, la femme a eu un rôle précis : celui de s’occuper de son foyer, de ses enfants et de tout mettre en œuvre pour être une épouse modèle. Nous sommes issues d’une culture judéo-chrétienne et la Bible, au travers de ses enseignements est claire à ce sujet ; certes, elle n’interdit pas qu’une femme travaille à l’extérieur de son domicile, mais met l’accent sur la préférence à donner au cas où il y aurait maternité. Qu’il est difficile de se départir de tout cela et de ne pas culpabiliser !
Pour l’historienne Michelle Perrot : ‘’… les femmes ont toujours travaillé, que ce soit au travers de petits boulots, mais aussi par les travaux domestiques qui souvent, ne sont pas reconnus’’.
Il y a eu les métiers qualifiés comme féminins tels que couturière, sage-femme, institutrice, nourrice et qui ont longtemps cultivé la barrière de la ségrégation.
Mais les choses ont changé, notamment lors de la grande guerre qui a entraîné une rupture importante dans l’ordre familial et social.
Les femmes ont pris le rôle de chef de famille et ont prouvé aux hommes qu’elles pouvaient endosser, assumer, remplacer.
En Suisse, malgré des mesures volontaires, - droit à un salaire égal ancré dans la constitution depuis 37 ans, loi sur l’égalité en vigueur depuis 22 ans -, l’on doit bien se rendre à l’évidence : si, dans le secteur administratif cela paraît acquis, dans le secteur public les inégalités de rémunération restent flagrantes et certaines entreprises sont encore loin de pratiquer la parité tant dans l’emploi que dans l’égalité salariale.
Dans notre Loge, nous avons conservé l’acclamation française ‘’Liberté-Egalité-Fraternité’’. Liberté et égalité de la femme. Quel beau rêve… Quel magnifique but à atteindre… Serait-ce une utopie ? Or, nous ne vivons pas dans une société égalitaire, et malgré les lois, les quotas, il est des patrons qui préfèrent être amendables plutôt que de respecter les items. Il n’y a pas de prince charmant pour nous sauver…
Désormais, les femmes ont la possibilité de s’épanouir dans de nombreux domaines : politique, agriculture, création artistique, sport, vie professionnelle… Aucune porte ne leur est fermée, rien ne leur est interdit. Toutefois, il faut prendre conscience que cet essor est et reste précaire et que leur rôle, leur impact est encore trop souvent oblitéré. Elles ont une place à conquérir, à faire reconnaître et même si l’image de la gente féminine au travail est en train de changer, son évolution est lente, très lente, mais inexorable. Un constat saute aux yeux : il vaut mieux être cheffe d’entreprise que ‘’petite main’’.
Rien ne leur est inaccessible ! Cependant, elles doivent en permanence lutter plus que les hommes pour prouver leurs capacités, leurs aptitudes à occuper des postes à responsabilité et de haut niveau, la réussite professionnelle étant encore trop souvent synonyme de virilité. Faut-il pour cela flouter sa féminité ? Agir comme si l’on était un homme ? Accepter des horaires hallucinants et des cadences de travail incompatibles avec une vie familiale ? Faire comme s’il n’y avait pas de problème ?
Ainsi, de trop nombreuses femmes sont encore contraintes de réduire leur temps de travail, de démissionner de leur emploi, voire tout bonnement être congédiées lorsqu’elles deviennent mères ou pire, cacher qu’elles sont enceintes lors d’un entretien d’embauche… et doivent jongler entre vie privée et vie professionnelle, tant il est vrai qu’il est difficile de gérer le métier de maman (enfants, écoles, devoirs, loisirs…), celui d’épouse (attentive aux besoins de son conjoint, prodiguant écoute, conseils, disponibilité, tout en restant belle et désirable), de femme au foyer (courses, cuisine, ménage, lessive…) et celui de femme active. Car la femme EST le travail ! Et elle cumule, jusqu’à l’épuisement. Il est évident que les femmes occupées professionnellement ont une double, une triple, voire une quadruple journée et que les distractions se font rares…
La recette pour être cette superwoman infatigable et performante ? Un mot revient comme un leitmotiv : l’organisation ! Savoir bien s’entourer, savoir déléguer et l’accepter, apprendre à gérer le quotidien, établir une liste des tâches et des priorités, fixer des limites claires, prendre soin de soi et, s’il y a lieu, savoir choisir le bon mari… Mais surtout, reconnaître et accepter le fait que l’on ne peut pas être sur tous les fronts. Ne pas culpabiliser… Se donner le droit d’être imparfaite !
Essayer de travailler différemment est évoqué : travailler autrement ne signifie pas travailler moins ou moins bien ; au contraire : organiser son emploi du temps, s’adapter aux technologies modernes, oser le changement, oser faire bouger les choses, voire déranger le quotidien, modifier ses habitudes, bref évoluer.
C’est essentiel pour soi-même, pour son entourage car chacune dans sa vie doit pouvoir se donner les moyens de se réaliser, trouver sa voie, découvrir ce pour quoi elle est faite, faire jaillir en elle ses ressources, réaliser sa créativité.
Quelques-unes d’entre nous reconnaissent qu’elles auraient préféré rester à la maison, leurs enfants étant en bas âge, afin de profiter de leurs croissance et épanouissement quotidiens.
Concilier vie personnelle et vie professionnelle signifie donner autant d’importance à chacune de ces deux vies. Est-ce possible ?
Cette question de la conciliation entre vie personnelle et vie professionnelle est tout à fait en phase avec notre époque, car la vie d’une femme peut parfois s’avérer contraignante et entrer en conflit avec les exigences ainsi que les attentes de sa vie privée. Il peut y avoir dilemme et la femme peut être déchirée entre le temps qu’elle alloue à son entourage, à soi-même et celui qu’elle accorde à son travail. Nous sommes souvent bloquées dans nos pensées et dans nos actes par des peurs, en fait irrationnelles et que nous trimballons au plus profond de nous-mêmes depuis des générations ; ou alors, nous ‘’bâchons’’, nous abandonnons, courbons l’échine… par peur de déplaire, par peur de perdre notre job, par peur de perdre l’amour de l’autre, par peur de le blesser…
Savoir effectuer une coupure entre la sphère personnelle et la sphère professionnelle est primordiale pour que l’une n’empiète pas sur l’autre.
Mais qu’est-ce que le travail ? Sachant qu’il vient de ‘’tripalium’’, - cet instrument de torture utilisé par les romains pour mettre au travail et dans une relation d’obéissance les esclaves rebelles -, faut-il le percevoir comme un épanouissement ? Une façon d’être autonome financièrement ? Il se devrait d’être un choix de vie, pris en toute liberté et en accord avec soi-même. Car faire carrière ne devrait pas être synonyme de sacrifice.
Le travail nourricier garantit à la femme une vie digne, lui permet d’assurer, quoiqu’il arrive ses besoins quotidiens. Il lui permet également la possibilité de sortir de son ignorance, de s’enrichir intellectuellement, de s’ouvrir à sa créativité et d’obtenir une reconnaissance qui n’est pas celle d’un ventre bien rempli ou d’une couette bien repassée.
C’est en effet un immense privilège que de bénéficier de la liberté de pouvoir choisir sous nos latitudes, ce que n’ont pas, et de loin, toutes les femmes (tous les êtres) selon les régions du monde où elles naissent et vivent.
Et si elles immigrent, elles emporteront avec elles leurs traditions, leurs coutumes et seules certaines d’entre elles s’ouvriront au pays qui les accueille, s’adapteront à un nouveau mode de vie et oseront défier l’interdit familial.
Et puisque nous sommes toutes des maçonnes :
Le sujet proposé sur la Femme et le Travail a suscité de nombreuses réactions parmi nos SS\, dont certaines pensent qu’un tel sujet de réflexion sociétal à but politique n’a pas lieu d’être discuté en Loge (en Suisse, il y a des instances politiques et associatives qui offrent le cadre approprié pour cela. Les médias audiovisuels, les livres et les journaux en parlent en tous sens et cette problématique revient à chaque votation) et qu’il appartient à la sphère privée.
Il faut se rendre à l’évidence : dans notre pays, il vaut mieux taire son appartenance à la Franc-maçonnerie, se montrer plus que discrète à ce sujet, car bon nombre d’employeurs pourraient mettre fin à une carrière professionnelle prometteuse s’ils étaient au courant…
Ce que la Franc-maçonnerie nous a apporté dans notre quotidien, entre autres ?
Grâce à ses symboles, une connaissance, une reconnaissance de soi-même et par extension, des autres.
Un désir de perfectibilité. La conscience de celle-ci et la non-projection de nos attentes sur autrui.
Un affranchissement des préjugés et des entraves à notre liberté de pensée.
Un esprit de tolérance, de respect de l’autre ; comprendre, agir, partager.
La confiance en soi, laquelle n’est pas innée chez la femme.
La gestion et la résolution de conflits, au travers de l’écoute, la maîtrise des émotions, l’affranchissement de la dualité et devenant un vecteur d’apaisement, de sollicitude et de bienveillance.
Un effet de vases communicants entre la quête maçonnique et la quête professionnelle et sociale.
Conclusion :
Il en va de la responsabilité de chacune d’être attentive à ses pensées, ses paroles et ses actes qui influencent inévitablement l’entourage et la vie de tous, dans un sens ou dans l’autre d’ailleurs, ce qui génère une loi incontournable de l’univers, celle de récolter très exactement ce que l’on sème.
Lorsque le geste est choisi et accepté, il participe à l’élévation du tout et l’effet papillon n’est souvent pas loin.
On se met à voir le monde différemment dès que l’on décide de bannir de son vocabulaire :
Le verbe vouloir
Ainsi que le verbe pouvoir !
Et notre souhait le plus cher est que notre Chaîne d’Union devienne une chaîne de force afin que notre idéal entre dans la réalité du quotidien.
Réflexion commune